11/12/2024
Conseils d'investissement
Avec la flambée des taux d’intérêt depuis 2022, de nombreux emprunteurs qui avaient obtenu des crédits à des taux historiquement bas se demandent s’ils peuvent transférer leur prêt à 1 % lors de l’achat d’un nouveau bien. Si cette solution semble séduisante, elle se heurte à des freins juridiques et économiques, malgré des appels croissants à son adoption.
Jusqu’en 2018, environ un tiers des banques françaises proposaient une clause de transférabilité dans les contrats de crédit immobilier. Cette option permettait aux emprunteurs de conserver les conditions de leur prêt initial, y compris un taux avantageux, pour financer l’achat d’un nouveau bien. Cependant, avec la baisse progressive des taux entre 2018 et début 2022, les banques ont supprimé cette clause, anticipant que la remontée des taux leur serait défavorable. En effet, permettre à un client de conserver un taux à 1 % alors que le marché propose des taux supérieurs à 3 % ou 4 % affecterait leur rentabilité.
Depuis le début de 2022, les taux de crédit immobilier ont connu une hausse spectaculaire, atteignant jusqu’à 4,3 % en septembre 2023 pour des prêts sur 20 ans. Bien qu’une légère décrue ait été observée en 2024, les taux restent élevés, avoisinant 3,5 %. Dans ce contexte, la possibilité de transférer un ancien crédit à faible taux représente un gain considérable pour les emprunteurs. Elle leur permettrait de maintenir leur pouvoir d’achat immobilier et d’éviter des mensualités nettement plus lourdes.
Les experts estiment que cette mesure pourrait également relancer un marché immobilier en difficulté. De nombreux propriétaires hésitent aujourd’hui à vendre leur bien, craignant de devoir renégocier un prêt à des conditions nettement moins favorables. La portabilité des prêts pourrait ainsi fluidifier les transactions et stimuler l’économie immobilière.
Malgré ses avantages apparents pour les emprunteurs, la « transférabilité » des crédits se heurte à une forte opposition des banques. La Fédération bancaire française (FBF) a exprimé en mai 2024 ses réserves sur cette mesure, pointant notamment sa complexité technique et son impact potentiel sur les contraintes en capital des établissements financiers. Selon la FBF, cette pratique pourrait également générer des coûts supplémentaires pour les emprunteurs, contredisant son objectif initial.
Face à ces blocages, plusieurs acteurs appellent à un débat national. Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM), milite pour une généralisation de la transférabilité et de la portabilité des prêts immobiliers. Il propose que ces dispositifs incluent également la possibilité pour un acquéreur de reprendre le prêt avantageux contracté par le vendeur.
Le député Renaissance Damien Adam avait déposé en mai 2024 une proposition de loi en ce sens, mais la dissolution de l’Assemblée nationale a suspendu son examen. Loïc Cantin continue de plaider pour des discussions impliquant banques, régulateurs et responsables politiques afin d’évaluer la faisabilité et les impacts d’une telle réforme.
Si la transférabilité des crédits à taux bas pourrait représenter une réponse efficace à la crise immobilière, sa mise en œuvre reste incertaine. Entre les réticences des banques et les impératifs de stabilité financière, un équilibre devra être trouvé pour répondre aux attentes des emprunteurs sans compromettre la viabilité économique des établissements prêteurs. Le débat reste ouvert.